Glissements de terrain, incendies, tremblements de terre, phénomènes météorologiques extrêmes… Les catastrophes naturelles survenues au Rwanda en 2020 auraient fait au moins 298 morts et 414 blessés, selon les données publiées par le ministère rwandais de la Gestion des catastrophes et des réfugiés. Une exposition aux aléas qui s’est encore vérifiée en mai dernier, avec l’éruption du volcan Nyiragongo - intervenue chez le voisin congolais, à Goma - qui n’a pas été sans impact au Rwanda. Au-delà des secousses ressenties jusqu’à Kigali, l’afflux de réfugiés a ainsi entraîné une hausse des cas de Covid 19, en plus des conséquences socio-économiques.
« Un chatbot piloté par l'intelligence artificielle a été développé pour favoriser des réactions rapides et immédiates, avant, pendant et après les catastrophes naturelles »
Pour anticiper au mieux ces cataclysmes, les autorités rwandaises ont annoncé en août la mise en place d’une solution de prévention des catastrophes, utilisant notamment l’intelligence artificielle. Concrètement, le dispositif passera par « un chatbot piloté par l'intelligence artificielle, et utilisé via une application baptisée Line, [qui] a été développée pour favoriser des réactions rapides et immédiates, avant, pendant et après les catastrophes naturelles», explique Deus TWAGIRAMUNGU, responsable de la surveillance des risques géologiques et technologiques au ministère précité. De fait, ce nouvel outil, conçu et développé avec le soutien de l’Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) et d’experts japonais, devrait considérablement améliorer la collecte et le traitement des données, affiner la modélisation des risques tout en assurant les communications d'urgence.
« Les applications de l’intelligence artificielle continuent d’augmenter les possibilités de progrès pour l’humanité et de faciliter l’atteinte des Objectifs de Développement Durable »
Dans ce contexte, l’UNESCO a poursuivi sa démarche consistant à établir les priorités et les besoins en renforcement des capacités des pays africains en matière d’IA; un travail entamé dès 2019 avec une précédente publication, Piloter l’IA et les TIC avancées pour les sociétés du savoir, et qui mettait notamment en évidence les écarts significatifs en termes d’accès aux connaissances, aux données, à l’éducation, aux formations et aux ressources humaines, nécessaires au développement et à l’utilisation de l’IA sur le continent.
Nombre de défis restent à relever, en particulier dans les domaines des Droits de l’homme et de l’éthique
Autant de besoins qui ne seront comblés que par « un renforcement des initiatives politiques en faveur de la gouvernance de l’IA et par le développement de cadres juridiques et réglementaires appropriés », plaide l’agence basée à Paris, qui rappelle par ailleurs dans son étude les (nombreux) défis restant à relever. En particulier « dans les domaines des Droits de l’homme et de l’éthique » ou bien sur des thématiques ciblées telles que l’omniprésence de la désinformation et du discours de haine en ligne.
Conscients des enjeux, les 32 États africains qui ont répondu à l’enquête de l’UNESCO, ont pour leur part sollicité le soutien de cette dernière pour la normalisation, l’élaboration de politiques, le renforcement des compétences et la création de réseaux, ainsi que pour répondre aux préoccupations liées à l’égalité des genres dans le développement et l’utilisation de l’IA.
En attendant, la course à la maîtrise de l’IA est lancée sur le continent : après l’évaluation du risque crédit via l’intelligence artificiell e- qui est déjà une réalité en Afrique du Sud, au Kenya et au Nigeria - ou l’usage des drones et de la modélisation 3D pour la préservation des forêts et la conservation des espèces en République démocratique du Congo, c’est le gouvernement rwandais qui devrait lancer dans le courant de l’année un centre d'excellence technologique, qui comprendra une académie dans les domaines de la numérisation et de l'intelligence artificielle. De quoi se doter des compétences nécessaires dans un domaine qui bouleversera durablement les écosystèmes politiques, sociaux et économiques.