Présentez-nous l’Open Startup Tunisie (OST) et ses missions ?
Houda Ghozzi :
OST a été créée en 2016. Une ONG qui a pour mission d’accompagner les écosystèmes d’innovation dans la zone MEA, notamment les pays qui sont les “challengers”, tels que le Sénégal, la Tunisie, le Maroc ou encore la Côte d’Ivoire. Nous accompagnons ces écosystèmes en créant des programmes éducatifs avec des acteurs tels que l’université Columbia et MIT, ainsi qu’un ensemble de partenaires intéressés à faire du renforcement de compétences en Afrique : Africa Grow, IFC, l’ambassade des Etats-Unis, Digital Africa, Africinvest ou encore Instadeep.
Le segment que nous servons est essentiellement l'entrepreneur early-stage, qu’il ou elle soit dans la tech, ou encore dans la Deep Tech. Nous accompagnons aussi le muscle autour de l’entrepreneur, tels que les coaches et les business angels.
Comment est né ce partenariat entre OST et Digital Africa autour du programme “Brain”?
Malek Lagha : Ce programme découle d’une observation réalisée grâce à l’ancrage de Digital Africa dans l'écosystème tech panafricain qui nous a permis de constater qu’il n’existait pas beaucoup de projets issus de la recherche scientifique sur le continent.
Aussi, bien que ces projets soient moins nombreux en Afrique que dans d’autres continents, il y a un manque criard de structures, de démarches pédagogiques, d’outils de ressources pour transformer un produit issu de travaux scientifiques en une entreprise viable en cinq ans.
En réponse à cette problématique, nous avons décidé de mettre en place un projet axé sur les profils scientifiques en Afrique. Nous avons ainsi mené une étude qualitative pour cartographier les acteurs clés de l’écosystème de soutien aux startups fondés par des chercheurs en Afrique et nous avons identifié plusieurs challenges, deux principaux.
“Nous avons identifié Brain comme une initiative singulière, made in Africa, avec des résultats prometteurs en Tunisie et avec un vrai potentiel en Afrique et à l'international”
D’abord, il y a peu de soutien. Ensuite, il y a beaucoup de difficultés à accéder aux ressources, tout comme il existe un manque de synergie entre les différents acteurs clés de l'écosystème deeptech, de l’activité entrepreneuriale, de la recherche. Alors que s’il y a de la synergie, on peut faire du sourcing de ces projets et optimiser l’accompagnement pour répondre aux besoins très spécifiques des chercheurs africains.
En conséquence de cette étude, nous avons identifié “Brain” comme une initiative singulière, made in Africa, avec des résultats prometteurs en Tunisie et avec un vrai potentiel en Afrique et à l'international.
Nous avons donc rejoint OST Tunisie, chef de file du programme, et le MIT déjà partenaire pour scaler Brain et surtout pousser sa panafricanisation.
Concrètement, comment va se dérouler ce partenariat, les objectifs visés et la feuille de route ?
Houda :
Brain est un projet holistique. On ne peut pas faire de deeptech et construire un écosystème deeptech juste en faisant de « l’éducationnel ». Pour asseoir un écosystème, c’est une machine qui a d’abord besoin d’inspiration. On avait déjà besoin d’inspirer les scientifiques pour qu’ils se disent « on peut y aller ». Ensuite, il convient ensuite de définir un programme éducatif, une base de coaches, une ouverture internationale, un accès à des talents complémentaires, à des structures d’accompagnement, des investisseurs…
Parce qu'aucun écosystème ne peut fonctionner sans cadre réglementaire qui le régit, et ce, en termes de protection de la propriété intellectuelle, en donnant aux chercheur.e.s, la possibilité de faire dédier du temps à la valorisation de leurs idées…
Brain aujourd’hui c’est 6 composantes articulées autour de notre mission: (1) inspiration (2) Education et mentoring (3) Accès au talents (4) Accès à des structures d’accompagnement et du financement (5) Réglementation (6) Recherche. La richesse de cette mission est permise notamment grâce à la force de nos partenaires: MIT et Digital Africa interviennent essentiellement sur les composantes éducationnelles, réglementaires et recherche. Africinvest intervient sur la partie éducationnelle et la partie financement.
La prochaine étape, par exemple, est une table ronde, inédite en Afrique se tenant en Tunisie les 9 et 10 octobre. 40 personnes qui font de la deeptech dans le monde ont été invitées dans le but d’écrire un livre blanc discutant le ou les modèle.s de Deep Tech possibles en Afrique pour faire en sorte qu’on ait de la deeptech faite en Afrique, pour l’Afrique. Digital Africa a soutenu cette activité avec pour objectif de mieux comprendre le paysage de la Deep Tech et de démarrer des échanges avec les différents acteurs opérant en Afrique.
Pour les composantes awareness, des vidéos mettant en avant des deep tech entrepreneur.e.s, avec un focus femmes, pour parler la langue de l’entrepreneur et essayer de vulgariser l’exercice, montrer que c’est possible.
Au mois de Mars, BRAIN bootcamp permettra de réunir une vingtaine d’entrepreneur.e.s pan-africains et, avec MIT, nous monterons notre premier bootcamp pour le continent. Là, il faut saluer la confiance que nous ont accordée Africa Growth, IFC, l’ambassade des Etats-Unis et Digital Africa. C’est aussi de l’inédit pour MIT qui pour le première fois inclut différents départements : MIT Africa, MIT Legatum Center for Development and Entrepreneurship ainsi que l’équipe de Idea Lab et ses étudiants de Executive education. Notre ambition est de créer un lab africain au sein de MIT pour pérenniser l’initiative et pour offrir un couloir spécifique aux idées innovantes made in Africa. Notre conviction c’est qu’il faut regarder l’Afrique comme un continent du futur capable de produire de la deeptech permettant de résoudre des challenges de taille auxquels le continent est confronté.
Malek :
Nous avons identifié plusieurs pistes de collaboration entre BRAIN et les activités “Capacity Building” de Digital Africa. Concrètement, nous soutenons les activités d’accompagnement et de recherche. Nous nous occupons aussi de l’inclusivité du programme à travers le monitoring des critères de sélection et la distribution des prix pour les meilleures startups féminines. Nous avons aussi un rôle catalyseur et fédérateur permettant de connecter le pool des partenaires BRAIN à des partenaires européens et africains. À travers notre implication à BRAIN, nous voulons donner de la visibilité aux startups ”made in africa” à l'échelle panafricaine, européenne et internationale.
La clôture de l’édition 2023 de BRAIN aura lieu à Tunis, le 9 et 10 Oct 2023 prochains. Suivez la panafricanisation du programme à partir de 2024 !