La période présente a démontré nos capacités à vivre et à surmonter collectivement les difficultés et les traumatismes grâce aux technologies. Aux quatre coins du continent africain comme du monde, la nécessité de faire fonctionner, malgré la pandémie, les services essentiels de la vie quotidienne, l’économie et les institutions, a révélé nos dépendances heureuses et malheureuses aux réseaux et aux innovations numériques.
Depuis plusieurs années, l’Afrique montre justement que la technologie appliquée à l’économie réelle dessine l’émergence d’un monde nouveau pour « le prochain milliard d’utilisateurs » (The Next Billion Users). En 2019, l’accélération de l’écosystème numérique africain avait franchi une étape importante, avec plus de 2 milliards de dollars levés par les start-ups, en hausse de près de 75% par rapport à 2018. Les services financiers numériques sur le modèle de M-Pesa, tels que M-Birr en Ethiopie, les drones qui acheminent les médicaments, ou permettent l’épandage ou l’irrigation tels que Kono Digital, les plateformes Open Science qui favorisent la recherche scientifique vernaculaire en Intelligence Artificielle comme Zindi, les infrastructures de télécommunications du type réseaux communautaires telles que le Moja Network développé par la société BRCK, déployés et exploités par les citoyens pour répondre à leurs propres besoins afin de garantir l’accès à l’éducation… Cette tech 4 good, made in Africa fait « mieux avec moins » pour servir les communautés, produire et distribuer des ressources, guérir, soigner, éduquer, nourrir, approvisionner, transformer, industrialiser...
Des innovations stratégiques mais fragiles
Et pourtant ces modèles d’innovation ô combien stratégiques sont sous contrainte maximale, en raison du très difficile accès des PMEs africaines aux capitaux - il leur manquerait à ce jour 331 milliards de dollars, d’après l’International Finance Corporation. L’Union Africaine prévoit une croissance négative de 0,9% en raison des effets de la crise résultant de la pandémie de COVID-19, qui affecte les flux commerciaux vers le continent en provenance de l’Union européenne , des États-Unis et de la Chine, réduit les transferts de fonds des diasporas, ou les investissements directs étrangers. La hausse des prix des produits de base, alliée à une baisse des demandes d’exportations (pétrole, riz, minerais, ou métaux), affecte à la fois la production et les revenus. À ces effets, s’ajoutent les réalités très tangibles et globales de l’augmentation des taux de mortalité, de la baisse des recettes fiscales et de l’augmentation des dépenses publiques. Ces projections peignent une réalité bien difficile pour les micros, petites et moyennes entreprises, qui constituent une partie essentielle des économies africaines. Selon l’Organisation Internationale du Travail, le secteur informel en Afrique subsaharienne représente 89% de l’emploi et les PMEs 38% du PIB. Dans ces pays, le déploiement des innovations est durement remise en question. Sous stress sanitaire, climatique, économique et géopolitique, la résilience des écosystèmes entrepreneuriaux africains est mise à rude épreuve !
Accompagner la résilience des écosystèmes entrepreneuriaux africains
Et justement, c’est parce que nous constatons cette résilience que nous voulons la célébrer et l’accompagner. Déjà, des secteurs tels que la fintech, la formation en ligne, la télémédecine explosent dans un monde en quarantaine où prédominent les mesures de distanciation sociale. D’autres - logistique et agriculture - sont en train de s’engager dans la digitalisation et entament un virage stratégique. Aussi avec resilient.digital-africa avons-nous décidé de cartographier les systèmes de soutien et tous les leviers de résilience - communautés, pairs, familles, business angels, mentors, enseignants, investisseurs, politiques publiques…- qui contribuent à faire émerger un modèle d’innovation centré sur le développement de l’Afrique pour les Africains et par les écosystèmes locaux. Nous souhaitons saluer le travail de ces femmes et de ces hommes, entrepreneurs innovants, capables de transformer positivement et durablement leurs communautés et les économies du continent. Nous voulons leur donner la parole et apporter de la visibilité à leurs solutions. A partir de notre rubrique ‘use-case’, nous voulons aussi et surtout constituer une base de données de référence dans laquelle des investisseurs engagés et enthousiastes, qui acceptent de faire le pari de l’Afrique, sauront identifier des solutions d’avenir qu’ils pourront accompagner dans leur passage à l’échelle.
Nous sommes convaincus que l’Afrique peut exporter son modèle d’innovation et ses solutions et inspirer d’autres acteurs et d’autres régions émergentes. Nous attendons avec impatience le moment où l’une des solutions mises en avant ici sera devenu une référence mondiale. Car beaucoup d’autres suivront !
Bonne lecture !