Le 7 mai dernier, le Rwanda inaugurait son Centre de sciences, de technologie, d'ingénierie et de mathématiques (STEM). D’une valeur de 100 000 dollars, ce centre dont le but est de promouvoir l’enseignement et l’apprentissage des filières scientifiques et technologiques auprès des élèves et étudiants est le premier d’une série de 8 établissements similaires qui doivent être créés dans les trois années à venir par l’Américain STEMpower.
Le fruit d’un partenariat entre le ministère rwandais de l'Education et l'ambassade d'Israël au Rwanda qui s’inscrit dans la stratégie menée par le pays des Mille collines pour promouvoir l’enseignement des STEM. Au cours de ces cinq dernières notamment, plusieurs initiatives ont été menées dans ce sens, de la création d'académies de codage à la construction de laboratoires scolaires dans les écoles du pays avec pour résultat, 64,4% des 9968 étudiants qui ont obtenu des bourses du gouvernement pour l'année universitaire 2019-2020 ont poursuivi des cours de STIM selon les données publiées par le Conseil de l'enseignement supérieur (HEC).
Les STEM pour répondre à l’inadéquation entre formation et emploi
Le Rwanda s’inscrit ainsi dans une tendance régionale : alors que, comme ailleurs sur le continent, les filières humaines et sociales attirent encore une majorité d’étudiants, face à l’inadéquation entre formation et emploi, principale cause du chômage des jeunes en Afrique, les responsables de la région ont tenu à changer la donne.
En effet, plusieurs pays d'Afrique de l'Est ont introduit des programmes d'études basés sur les compétences scientifiques au cours des cinq dernières années. Le Kenya, en premier lieu, véritable pionnier en la matière. Le pays, déjà réputé pour la qualité de son enseignement supérieur mais également concerné par un fort taux de chômage des jeunes diplômés, a très tôt initié une politique de promotion des STIM conjointement menée par le ministère de l’éducation et celui du numérique. Laquelle s’est traduite par l’intégration, et la promotion de ces filières dans les programmes d’enseignement, la création ou l’accompagnement de centres dédiés aux technologiques, ou encore la mise à niveau des enseignants. Sur la feuille de route également, un projet des plus ambitieux : le Kenya Advanced Institute of Science and Technology, résultat d’un partenariat avec le Korean Advanced Institute of Science & Technology (KAIST), qui doit accueillir ses premiers étudiants en 2022.
La science une priorité nationale
Résultats, au Kenya comme au Rwanda, cette politique commence à porter ses fruits. Publié par la Cornell University, l’INSEAD Business School et l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, l’Indice mondial de l’innovation (Global Innovation Index) parmi les 20 pays qui « sur-performent » le plus en matière d’innovation par rapport à leur niveau de développement, on retrouve le Kenya et le Rwanda. Leur point commun? Leurs gouvernants ont fait de la science une priorité nationale.
Pour améliorer encore ces résultats, le ministère rwandais de l'Education a depuis début octobre- date correspondant au début de l’année scolaire dans le pays- introduit un programme hebdomadaire de formation professionnelle des enseignants sur ces disciplines, dispensé après les heures de cours. Chaque mercredi après-midi, les enseignants se réunissent ainsi et choisissent un sujet d'intérêt pour lequel ils peuvent demander une formation personnalisée. Ce nouveau dispositif s'ajoute au fait que plus de 80 % des écoles secondaires du Rwanda peuvent accéder à au moins 50 ordinateurs connectés, via le programme « Smart Classroom (Classe intelligente) », ce qui permet aux enseignants et aux élèves d’utiliser les outils numériques mis à leur disposition pour faire des recherches et s'informer sur les sciences.
Les disciplines STIM prennent racine
Une politique volontariste que salue Herine OTIENO, la directrice des programmes de formation des enseignants au très élitiste Institut africain des sciences mathématiques (African Institute for Mathematical Sciences, plus connu sous l’acronyme AIMS) de Kigali. « Le Rwanda a délibérément investi dans la promotion des cours de STIM dans les écoles, non seulement dans les villes mais aussi dans tout le pays. Les [Smart Classrooms] , les enseignants formés et les environnements d'étude facilités par des programmes tels que les programmes d'alimentation scolaire, entre autres, ont permis aux étudiants et aux enseignants de suivre plus facilement les cours de STIM, qui nécessitent généralement beaucoup de ressources », se félicite la responsable pédagogique.
Mieux, le nombre de filles suivant des cursus « STIM » a augmenté de manière significative au cours des dernières années ; à tel point que lors de la proclamation des résultats de l’examen national cette année, très orienté « sciences », la majorité des dix meilleurs élèves du pays étaient des filles. Pour Herine OTIENO, « c'est un indicateur fort que les disciplines STIM prennent racine », et ce même si « il y a encore des domaines à améliorer, notamment en termes de ressources, comme le ratio étudiants/manuels et les laboratoires pour les cours de sciences ».